vendredi 12 juillet 2013

Ils disent leur Syrie qui saigne

Oeuvre de Tammam Azzam
Ils disent leur Syrie qui saigne, celle étouffée par l'implacable main de la haine, celle lacérée dans les couloirs de nos puissants. Ils accompagnent, sans s'essouffler, la voix d'un peuple noble écrasé sous les gravas de la déraison. Ils disent le silence du monde, les massacres tolérés, les droits bafoués, mille fois piétinés, mille fois méprisés. Ils dénoncent l'indifférence coupable, nomment l'innommable, désignent l'insupportable. Ils disent les enfants perdus, offense absolue plantée dans le coeur du peuple.  Ils disent Homs et sa mosquée éclatée en veille de Ramadan, Alep, ville en partance, secouée de toutes les folies, le pont de Deir ez Zor pulvérisé, Hama, Qousseir, Banyas, Raqqa, Azaz, Damas... Ils disent le viol de leur pays, l'acharnement à le salir. Ils disent l'exil et l'urgence, le désespoir et la perte. Ils disent la griffe enfoncée dans les mailles de leurs identités. Ils disent la rage et la haine. Et ils disent cette autre Syrie, celle qui adviendra, celle pour laquelle ils luttent. Terre d'un grand peuple, uni malgré l'élan sournois qui n'ambitionne que la division. Terre de la douceur vraie et des chants légers. Terre où la fraternité n'était pas un vain mot. Terre d'une paix demain à reconstruire.

Ils crient pour les matins libres.
Ils crient pour le droit à leur humanité digne.

Artistes, écrivains, poètes, calligraphes, cinéastes, photographes, comédiens, musiciens, c'est avec d'autres armes qu'ils interpellent, celles qui vont à l'essentiel, celles qui en appellent à l'humain, langages universels qui atteignent sans détours ce qui nous est commun. 

Chacune de leur voix est un écrin pour l'espoir, une force pour la révolte, une mémoire pour demain. Comme en toute dictature, sous chaque pouvoir enragé, comme en temps de guerres folles, ils sont fragiles parce que visés, puissants parce qu'au delà de la peur. Ils vivent du pain noir de la vie souterraine ou des exils déchirés. Ils ont choisi. Ils sont debout.
Ali Ferzat, Maha Hassan, Tammam Azzam, Nihad Wicho, Reem Yassouf, Wissam Al Jazairy, Amr Fahed, Fadwa Suleiman, Omar Al-Akhras, Fadi Azzam, Raffi Sarki, Farouk Mardam Bey, Othman Moussa, Maram Al-Masri, Noma Omran, Abounnadara, Jaber Al Azmed, Ahmad Ali, Monif Ajaj, Mohammed Roumi, Khaled Khalifa, Fadia Afashe, Khaled Khadour, Riyadh Neama, Safwan Dahoul, Mohammad Omran, Khaled Al-Khani, Abdalla Omari, Oussama Mohammad, Aïcha Arnaout, Hala Alabdalla, Abdul Karim Majdal Al Beik, Sulafa Hijazi, Hala Mohammad, Soutour, Rohan Houssein, Samar Yazbek, Fares Cachou, Anas Salameh, Mouneer Alshaarian, ceux de Kafarnabel...
Et ceux que je ne connais pas.

Et tous ceux, discrets, anonymes, qui se tiennent là, présentes, présents à chaque jour, travailleurs infatigables.
Ils disent le sang et la sève.
Ils disent la longue nuit syrienne et la lumière qui viendra.

Marion Coudert

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