Les enfants du jardin. Hama-Syrie. Photo N.T. Camoisson |
Mille chemins me mènent vers vous.
Aucune arme ne peut défaire ce qui nous lie.
Vers vous j'allais, Vers vous je vais. Vers vous j'irai toujours.
Vers votre terre dont la beauté ne sera jamais altérée par la violence d'hommes qui n'en sont pas dignes. Votre terre, bleue et blanche et verte et parcourue de toutes les douceurs.
Je prendrai tous les chemins possibles, je franchirai les frontières inscrites dans les paumes de la haine.
Et je reviendrai bientôt choisir mes légumes à l'odeur qu'ils diffusent au marché de Hama. Oui, je reviendrai bientôt vous reprocher gentiment ces interminables repas que vous mettez tant de coeur à préparer pour me recevoir comme si j'étais plus importante qu'un autre. Je continuerai à échanger avec vous sur nos différences qui ne sont rien d'autre que des ponts entre nous. Je me glisserai à nouveau dans la cuisine pour laisser s'égrener le rire de vos femmes. Je laisserai encore mon fils courir avec vos fils dans les allées parfumées de vos jardins. j'irai avec vous jusqu'à la nuit, noyée par trop de café mais tenue en éveil par vos mille et unes questions sur le monde dont je viens. Je continuerai de vous admirer, agiles danseurs sur les roues de Hama. Je continuerai de me taire et d'aimer mon silence lorsque vous travaillez et que vous déployez vos trésors d'énergie et de force. Je reprendrai mes marches avec vous lorsque vous avez envie de me montrer vos jardins, vos arbres, vos légumes, la beauté de vos fleurs, la fraicheur de votre ombre, la clarté vos fruits. J'accepterai toujours les roses blanches d'Abdhallah, sa main qui se tend, son sourire qui s'éveille. Je m'amuserai toujours des espiègleries d'Abou Nayef, continuerai de l'appeler Charlie, Charlot, Chaplin, même moustache, même pantalon, même démarche, même regard rieur et un peu triste. Je prendrai Siam dans mes bras et lui raconterai, comme avant, dans une langue qu'elle ne comprend pas, des histoires pour l'étonner, des mots pour la surprendre. Et je me lèverai à l'aube, pressée de vous rejoindre, je traverserai les halles de Hama, juste pour me sentir à l'intérieur des halles de Hama. Et j'oublierai le temps auprès de mon ami Yasser à aimer son silence, ma main dans la main claire de sa femme. Et j'écouterai mon coeur s'emballer au rythme de la plus belle des roues, celle qui m'attache à votre terre, pour toujours, al-Gisrayya.
Vers vous j'allais. Vers vous je vais. Vers vous j'irai toujours.
Serez-vous encore là ?
Marion Coudert
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